Bitcoin est souvent perçu comme une réserve de valeur, une alternative à l’or. Cependant, avec l’émergence du protocole Ordinals, Bitcoin devient également un terrain fertile pour l’innovation on-chain et les NFT. Dans cet article, nous allons expliquer le protocole Ordinals de Bitcoin, son fonctionnement et pourquoi il représente une avancée significative pour Bitcoin.
Qu’est-ce que le protocole Ordinals de Bitcoin ?
Le 20 janvier 2023, Casey Rodarmor, développeur Bitcoin Core, annonçait sur X que « les inscriptions étaient désormais disponibles sur le mainnet de Bitcoin ». Le protocole qu’il développait depuis plusieurs mois voyait enfin le jour sous le nom d’Ordinals.
La théorie Ordinals
Chaque Bitcoin est divisible en 100 millions d’unités appelées satoshis (ou sats). Ces unités s’échangent quotidiennement depuis 2009, ce qui rend difficile leur identification et traçabilité.
Le protocole Ordinals permet de numéroter chaque satoshi – la plus petite unité de Bitcoin – dans leur ordre de minage et de les suivre individuellement. Le nom « Ordinal » fait référence à ce schéma « premier entré, premier sorti », basé sur l’ordre naturel des événements.
Cette numérotation permet d’introduire le concept d’inscription, grâce auquel on peut associer des données (comme des images, du texte ou des vidéos) à chaque satoshi, les transformant ainsi en artefacts numériques.
Les Inscriptions
La partie la plus populaire du protocole Ordinals est sans doute les inscriptions. Elles permettent d’inscrire de manière permanente des données dans la blockchain Bitcoin.
Les données sont limitées par la taille des blocs. Elles peuvent être des images, des fichiers textes, des clips audios, des GIFs, voire des jeux vidéo.
Rapidement, les inscriptions ont envahi la blockchain Bitcoin, saturant même parfois le réseau et provoquant la colère des puristes. Mais Ordinals a ainsi ouvert la voie aux tokens fongibles (BRC-20, Runes, rare sats) et non fongibles (NFT) pouvant être stockés et échangés sur Bitcoin.
En résumé, Ordinals permet de transformer chaque satoshi en une pièce de collection numérique.
Comment fonctionne Ordinals ?
Parlons technique.
Rappels historiques sur Bitcoin
Ordinals s’appuie sur deux mises à jour majeures de Bitcoin : SegWit et Taproot.
- SegWit (Segregated Witness) introduit en juillet 2017, a réorganisé les transactions en déplaçant une partie des données dans une base de données séparée. Cela a permis d’augmenter la taille des blocs et d’améliorer la vitesse des transactions.
- Taproot, introduit en 2021, a ajouté la possibilité de supporter des smart-contracts plus légers et complexes, stockés dans la partie witness data des transactions.
Processus d’inscription
Casey Rodarmor a utilisé ces mises à jour pour créer Ordinals. Le protocole permet de stocker de grandes quantités de données dans un bloc et d’effectuer des calculs complexes.
Le processus d’inscription se déroule en plusieurs étapes :
- Préparation des données : Les données à inscrire sont converties en format hexadécimal.
- Création du script Taproot : Les données hexadécimales sont encapsulées dans un script Taproot.
- Création de la transaction :
- Transaction de commit : Contient une référence de hachage au script Taproot.
- Transaction de révélation : Dépense la sortie de la transaction de commit en révélant le script complet, inscrivant les données sur le satoshi.
- Diffusion et minage : Les transactions sont diffusées et confirmées par les mineurs, intégrant les données dans la blockchain Bitcoin.
Les opportunités offertes par Ordinals
Création d’actifs numériques
Les artistes peuvent créer et vendre des œuvres d’art numériques inscrites sur la blockchain de Bitcoin, garantissant leur authenticité et leur unicité. Les collectionneurs peuvent acheter et échanger ces artefacts en profitant de la sécurité du réseau. Beaucoup d’artistes et de projets ont créé leurs collections de NFT sur Bitcoin, on vous en présente de temps en temps sur Symbole Art. Justin Aversano a notamment créé une collection de 136 prints de sa photographie « Colin in the car ».
Low inscriptions : les premières inscriptions
Les inscriptions sont numérotées dans un ordre croissant. Il existe aujourd’hui plus de 70 millions d’inscriptions, et leur nombre continue de croître. Il existe un marché pour les premières inscriptions numérotées en dessous de 1000, 10.000, ou 100.000. On les appelle les low inscriptions. Les Ordinals Tulips sont une collection entièrement inscrites dans les 10.000 premières inscriptions.
Tokens fongibles
Avec des standards comme le BRC-20 ou Rune, il est possible de créer des tokens fongibles sur Bitcoin, facilitant l’émission d’actifs numériques et l’intégration dans des applications décentralisées.
Bitmap : le métavers de Bitcoin
Lancée en 2023, Bitmap est un environnement virtuel construit sur l’ensemble des blocs du réseau Bitcoin. Chaque bloc est un district du métavers Bitcoin, les transactions de chaque bloc correspondent aux parcelles de chaque district. Ainsi la configuration du métavers de Bitcoin est régie par l’utilisation réelle du réseau.
Natcats
Le projet Natcats utilise une toute nouvelle approche pour générer des images de chats (Natcats) à partir des données spécifiques de certains blocs de transactions Bitcoin. Les numéros des blocs déterminent les caractéristiques de chaque Natcat, introduisant ainsi le concept de “rareté dynamique” et de « traits non publiés« .
Raresats
On peut identifier différents types de satoshis.
- Les satoshis qui répondent aux événements périodiques dans Bitcoin, comme la création de nouveaux blocs, les ajustements de difficulté, les halvings… Le premier satoshi qui a suivi le dernier halving a été vendu 33BTC soit plus de 2 millions de dollars. Plusieurs places de marché ont émergé (Magisat, Magiceden, Sating) et Sotheby’s organise régulièrement des ventes.
- Les satoshis exotiques qui sont liés à des événements particuliers de l’histoire de Bitcoin (comme les satoshis de la première transaction bitcoin) ou qui ont des propriétés numériques particulières comme les satoshis dont l’identifiant est un palindrome.
Avantages et inconvénients du protocole Ordinals de Bitcoin
Avantages
- Stockage sur la blockchain : Assure immuabilité et indépendance vis-à-vis des solutions de stockage externes.
- Sécurité : Bénéficie de la sécurité du réseau Bitcoin.
- Compatibilité : Facilement intégrables avec l’infrastructure existante de Bitcoin.
- Innovation : Stimule de nouvelles applications et cas d’utilisation au sein de l’écosystème Bitcoin.
Inconvénients
- Problèmes de scalabilité : La blockchain Bitcoin n’est pas optimisée pour les transactions à haute fréquence.
- Limitations de taille : Restriction sur la quantité et la complexité des données pouvant être inscrites.
- Fonctionnalité simple : Contrats intelligents avancés difficile à mettre en place.
- Impact environnemental : Le minage de Bitcoin est énergivore.
- Coûts élevés : Les frais de transaction peuvent être prohibitifs pour les utilisateurs.
Les débats autour d’Ordinals
L’arrivée du protocole Ordinals a créé un débat houleux entre les utilisateurs, et à juste titre !
Arguments Contre
Certains membres de la communauté Bitcoin voient les inscriptions Ordinals comme une attaque contre le réseau – oui carrément ! Ils considèrent en effet que le protocole Ordinals exploite une faille permettant de spammer la blockchain de Bitcoin. Ils craignent que cela alourdisse le réseau et augmente les frais de transaction, rendant plus difficile l’exécution de nœuds complets.
Arguments Pour
D’autres estiment que Bitcoin est un réseau ouvert où chacun doit pouvoir utiliser la blockchain comme bon lui semble. L’augmentation des frais de transaction causée par les inscriptions Ordinals est vue positivement par les mineurs, car elle augmente leurs revenus et incite à sécuriser davantage le réseau.
Conclusion
Ordinals représente une avancée fascinante dans l’utilisation de Bitcoin. Ce protocole ingénieux permet de créer des artefacts numériques directement sur le réseau. Bien que le protocole présente certains défis, son potentiel d’innovations et de nouvelles applications pour Bitcoin est indéniable.
Bitcoin doit-il rester focalisé sur sa fonction monétaire à savoir, recevoir-envoyer-stocker des bitcoins ? Ou sa sécurité et sa décentralisation doivent elles être mises au service d’autres applications potentielles comme celles permises par le protocole Ordinals ? C’est toute la question. Mais que vous soyez un bitcoiner maximaliste, un artiste numérique ou un investisseur, Ordinals mérite votre attention. Il redéfinit la possession et l’échange d’actifs numériques, tout en exploitant la robustesse et la sécurité de la blockchain Bitcoin.
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